L’abeille noire

Connaissez-vous l’abeille noire ? Celle que l’on appelle aussi Apis mellifera mellifera est l’espèce la plus répandue parmi les 20 000 espèces d’abeilles recensées par les scientifiques. Elle est présente sur terre depuis des millions d’années. Bien adaptée à son milieu, généreuse en miel mais dotée d’un caractère bien trempé, elle est malheureusement en voie de disparition.

C’est dans la vallée des Encombres, en Savoie, à plus de 2000 m d’altitude, que Klébert Silvestre, apiculteur passionné et passionnant, et président du Centre d’études techniques apicoles (CETA), me fait découvrir un univers qui m’était inconnu et où le bruit des battements d’ailes des butineuses annonce la récolte du miel qui s’est accumulé au fil de la saison d’été. Mais ce monde feutré est aussi victime d’un danger silencieux et presque invisible aux yeux des profanes que nous sommes.
En effet, depuis une vingtaine d’années, les abeilles disparaissent massivement dans notre pays. Un apiculteur peut ainsi enregistrer jusqu’à 50 % de perte sur une année. On appelle ce phénomène le syndrome d’effondrement de la colonie d’abeilles.
L’utilisation intensive de pesticides, la dégradation de la biodiversité, le frelon asiatique, les maladies et autres virus… Les causes sont nombreuses et nous semblons impuissants face à ce drame qui se joue sous nos yeux. Sauf à prendre les mesures draconiennes qui s’imposent.

L’hybridation des abeilles
L’autre danger qui guette nos abeilles noires est le croisement avec d’autres espèces dont le rendement est plus important, comme l’abeille italienne ou caucasienne. L’hybridation entre l’abeille noire et ces sous-espèces est une vision à court terme selon Klébert : « Elles produisent peut-être plus, mais moins longtemps, car elles sont moins résistantes. » La surproduction de miel n’est pas non plus une bonne chose pour notre écosystème car elle appauvrit les ressources.
Pour retrouver une abeille noire non métissée dans ses belles montagnes de Savoie, Klébert s’est lancé dans l’élevage de reines dites “pures”, 100 % Apis mellifera mellifera ! La technique qu’il me montre est totalement naturelle et assez complexe. Devant mes yeux ébahis, le faiseur de reines me révèle le secret de la vie. Tout commence par l’enfumage des ruches. Il faut montrer notre présence aux abeilles pour qu’elles puissent se mettre à l’abri dans la ruche. Cette technique nous évite d’être piqués, une abeille avertie en valant deux ! Klébert isole ensuite les larves d’abeilles de la bonne souche et les dépose dans une cupule puis dans la ruche orpheline quelques jours. Auparavant, il a trouvé et isolé la reine d’une ruche pour créer un manque chez ses congénères. Klébert replace ensuite les larves orphelines dans la ruche ; les ouvrières, en manque de reine, vont s’en occuper en les nourrissant pendant plusieurs jours à la gelée royale. Après 16 jours, la nouvelle souveraine naîtra.
Je ne sais pas combien de reines Klébert a fait naître, mais il est certainement à la tête d’une véritable armée d’abeilles noires pures qui butinent les fleurs de nos montagnes pour nous offrir un miel d’exception.

 

Par Gérald Ariano

 

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Dans chaque épisode d’“Une vie de bêtes” sur Ushuaïa TV, Gérald Ariano part à la rencontre des professionnels du monde animal. Chacune de ces rencontres est l’occasion pour lui de travailler à leurs côtés et de découvrir les particularités de ces métiers passionnants.

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