Dans une étude publiée dans la revue "Cell" le 19 septembre, une équipe internationale de recherche, dirigée par une scientifique...
LireQue disent les pleurs des chiots ?
Afin de comprendre quelles informations sont encodées dans les pleurs des chiots, les scientifiques ont d’abord enregistré 4400 cris produits par plus de 200 chiots Beagle issus de 40 portées différentes. Des analyses acoustiques fines leur ont ensuite permis de montrer que les pleurs contiennent une signature vocale propre à la portée, et, au sein de chaque portée, une signature individuelle… un peu comme si chaque chiot avait un « nom de famille » et un « prénom » !
Mathilde Massenet, qui a piloté l’ensemble des analyses, ajoute que « ces différences concernent notamment la fréquence fondamentale des pleurs, un paramètre important lié à la hauteur perçue, plus ou moins aigüe ou grave, des vocalisations. Chaque portée possède sa propre gamme de fréquences au sein de laquelle, les chiots relativement plus petits émettent généralement des vocalisations plus aigües que celles de leurs frères ou sœurs plus grands ».
Les résultats de cette étude suggèrent donc que les pleurs des chiots peuvent transmettre aux mères des informations importantes leur permettant d’identifier acoustiquement leurs chiots et d’évaluer ce dont ils ont besoin. Les scientifiques ont vérifié cette hypothèse avec des expériences de repasses acoustiques durant lesquelles ils ont présenté aux mères des signaux modifiés avec des méthodes de resynthèse acoustique. Leurs observations sont claires : les chiennes utilisent la hauteur des pleurs pour identifier leurs chiots et évaluer leurs conditions physiques, apportant plus de soins maternels en réponse aux cris de leurs propres chiots particulièrement lorsque ces derniers sont modifiés pour simuler les cris d’un chiot relativement petit de leur portée. « De nombreuses mères apportaient même le haut-parleur dans le nid avec les chiots, montrant qu’en l’absence d’indices olfactifs, les pleurs peuvent à eux seuls déclencher des réactions maternelles extrêmement fortes » ajoute David Reby, responsable de cette étude. Il explique aussi que « ce comportement assez surprenant nous interroge sur la capacité des mères à former une représentation mentale de leurs petits et ouvre de nouvelles perspectives de recherche en cognition animale ».
Est-ce que le pleur du chiot fonctionne comme le pleur du bébé humain ? La réponse est certainement « oui ». « En effet, les pleurs des bébés transmettent également des informations sur leur identité et ces informations sont perçues par leurs parents pour leur apporter des soins », explique Nicolas Mathevon qui dirige également un projet de recherche sur les pleurs des bébés humains. Avec cette étude, les scientifiques ont une nouvelle fois démontré que notre système de communication vocale partage de nombreuses similarités avec celui des espèces animales non humaines.
Cette étude, menée en collaboration avec l’Université du Québec à Chicoutimi (Canada), l’INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, France), l’école vétérinaire Maisons-Alfort (France), et avec le soutien financier de l’ANR (IDEXLyon Fellowship attribué à David Reby et projet SCREAM attribué à David Reby et Katarzyna Pisanski) et de l’Institut universitaire de France (chaires attribuées à David Reby et Nicolas Mathevon), fait partie d’un projet plus large visant à améliorer notre compréhension de la communication vocale des mammifères.
*****
Source : CNRS / Université Jean Monnet Saint-Etienne
Photo : Pixel-Shot / Shutterstock