L’océanite de Nouvelle-Calédonie : une nouvelle espèce d’oiseaux, déjà menacée3 min de lecture

Un nouvel oiseau marin à peine plus grand qu’une hirondelle, endémique de Nouvelle-Calédonie, est décrit dans le Bulletin of the British Ornithologists’ Club du 11 mars 2022 par une équipe incluant des scientifiques du CNRS et de l’INRAE au Centre d’études biologique de Chizé (CNRS/La Rochelle Université). L’événement est d’autant plus remarquable que l’océanite de Nouvelle-Calédonie, observé à partir de 2008, correspond aussi à trois spécimens “oubliés” dans des muséums. Avec une population estimée à 100 à 1000 couples, cet oiseau serait déjà menacé.

On dénombre aujourd’hui un peu plus de 10 000 espèces d’oiseaux sur la planète, et on en découvre une à cinq nouvelles par an en moyenne. Parmi les 430 espèces d’oiseaux marins, un tiers sont des pétrels, proches cousins des albatros. Comme ils sont nocturnes, discrets et nichent pour la plupart dans des îles reculées, ils restent mal connus dans l’ensemble.

Un oiseau inconnu de la famille des pétrels-tempête a été observé au large de Nouméa à partir de 2008 : son ventre rayé le distingue des autres oiseaux de cette famille, à l’abdomen blanc. Des observations régulières d’individus d’apparence identique dans la mer de Corail (à l’est de l’Australie), à partir de 2010, ont attiré l’attention des spécialistes.

D’autres indices sans lien apparent intriguaient aussi depuis longtemps les ornithologues : il s’agit de cinq spécimens de pétrels à ventre rayé , collectés il y a plus d’un siècle lors d’expéditions dans le Pacifique et répartis dans les collections de plusieurs muséums à travers le monde, qui avaient tous été identifiés à tort comme des espèces différentes.

Récemment, trois de ces spécimens ont été formellement identifiés comme étant des océanites-tempête de Nouvelle-Zélande, une espèce que l’on pensait éteinte, redécouverte en 2003. C’est d’ailleurs un de ces oiseaux qu’ont d’abord pensé observer les ornithologues au large de Noumé a, mais grâce a un travail minutieux basé sur l’étude morphologique, la génétique et l’étude des archives des muséums, les pétrels observés au sud de Nouméa et en mer de Corail ont pu être classés avec certitude comme espèce “nouvelle”, baptisée océanite de Nouvelle-Calédonie (Fregetta lineata), tout comme deux des mystérieux spécimens centenaires (l’un collecté aux Marquises en 1922, un autre aux Samoa en 1839) et un troisième collecté en 1973 sur une île du Queensland, en Australie.

Les auteurs ont apporté la preuve que l’oiseau se reproduit en Nouvelle-Calédonie puisqu’un poussin encore couvert partiellement de son duvet y a été photographié en septembre 2014. Les Marquises et Samoa représentent très certainement la zone hors reproduction d’après les dates de collecte des spécimens.

Où se reproduit Fregetta lineata exactement ? Tous les îlots du lagon sud de la Nouvelle-Calédonie ont été visités et soigneusement fouillés, avec plusieurs nuits passées sur la plupart d’entre eux, et aucun pétrel-tempête n’y a jamais été vu ni entendu. La nouvelle espèce pourrait se reproduire soit sur des îlots de la lagune de Bouloupari (non explorée), soit à l’intérieur des terres, possiblement dans la vallée de la rivière Tontouta où se reproduit une autre espèce de pétrels.

Il est maintenant essentiel de trouver ces sites de reproduction afin de prendre des mesures de protection immédiates. En effet, sur la base du nombre d’oiseaux observés en mer, la population est peut-être de l’ordre de 100 à 1000 couples et potentiellement déjà en danger critique d’extinction.

Source : CNRS