SOS Grand Bleu, cap sur la Méditerranée5 min de lecture

Situé au carrefour de trois pays, le sanctuaire Pelagos a vu le jour en 1999 pour protéger les mammifères marins en Méditerranée.

La France, Monaco et l’Italie ont signé un accord pour œuvrer à la protection des cétacés et de leurs habitats contre tout ce qui peut les mettre en danger : pollution, bruit, captures, blessures… En Méditerranée, les perturbations sont nombreuses. Si la grande bleue attire par la beauté de ses plages et de ses eaux cristallines, on oublie trop souvent qu’elle est aussi et avant tout la demeure d’animaux majestueux qui cohabitent tant bien que mal avec l’homme.

Le sanctuaire est né de la constatation dans les années 1980 qu’un grand nombre de mammifères marins occupent cette zone, attirés par l’abondance du plancton. Il fallait donc réagir vite pour sauver cette biodiversité marine de la forte présence de l’homme dans cette région. Le sanctuaire Pelagos a précisément pour mission de protéger, de sensibiliser et d’encadrer les activités humaines.

À l’origine du projet se trouvent de nombreuses associations qui, conscientes de l’urgence de la situation, se sont battues pour faire bouger les choses. C’est le cas notamment de SOS Grand Bleu, une association reconnue d’utilité publique implantée à Saint-Jean-Cap-Ferrat, dont l’objectif est la mise en œuvre, le développement et l’encouragement de toutes les actions visant à protéger la faune et la flore de Méditerranée.

En 1986, avec Greenpeace et quelques scientifiques, ils ont été les premiers à dénoncer le problème des filets dérivants qui faisaient des ravages sur la population des cétacés en mer. Avec leur vaisseau amiral, le “Santo Sospir”, ils ont été de toutes les batailles pour que la prise de conscience soit globale, bien conscients que seule l’union fait la force. Trente-cinq ans plus tard, c’est donc à bord de ce magnifique voilier que je m’apprête à embarquer pour en savoir plus sur cette difficile cohabitation homme/animal.

À bord du Santo Sospir
C’est Murielle Oriol, la directrice et chargée de mission de l’association, qui m’accompagne pour cette expédition dans le sanctuaire. Ensemble, nous allons essayer d’observer les dauphins qui nagent le long des côtes. La Côte d’Azur a la particularité d’avoir de grands fonds marins (plus de 1000 m de profondeur) qui attirent ces animaux. En effet, après seulement une demi-heure de mer, un groupe de dauphins bleu et blanc vient nager à l’étrave de notre navire, comme s’ils venaient nous saluer. Quelle merveille ! Je n’en reviens pas de voir aussi rapidement et d’aussi près ces animaux qui font tant rêver.

Le bateau ralenti pour diminuer le bruit du moteur et éviter les accidents. Murielle m’explique que cela fait partie du “code de bonne conduite” dans le sanctuaire. Nous devons également respecter une distance de sécurité et ne pas chercher à aller à leur rencontre. Première grande leçon pour moi : ne pas entrer en contact avec les animaux. Murielle m’explique que les dauphins sont des animaux qui ne craignent pas l’homme. Au contraire, ils peuvent même chercher notre présence, et c’est bien là le problème.

Pour nager avec des cétacés, il faut forcément s’approcher très près d’eux, ce qui les perturbe, notamment s’il s’agit d’un cachalot qui remonte à la surface afin de s’oxygéner avant de repartir vers les abysses pour se nourrir. De plus, se mettre à l’eau avec les cétacés peut être dangereux pour l’homme : risques de transmission de maladies, aussi bien de l’homme à l’animal que de l’animal à l’homme, mais aussi risques de blessures ou de noyade puisque ces puissants mammifères marins pèsent de 100 kg à plusieurs tonnes…

Depuis le 1er janvier 2021, il donc est interdit d’approcher volontairement ces cétacés à moins de 100 m dans le sanctuaire. Les approcher pour les observer, les étudier et comprendre leurs fonctionnements et leur mode de vie reste toutefois possible, à condition de respecter certaines règles élémentaires.

Au bout de quelques minutes, attirés par notre présence, une centaine de dauphins bleu et blanc viennent jouer dans les vagues du Santo Sospir. Quel spectacle magnifique, je ne sais plus où regarder ! Ils jaillissent de partout ! Le bateau ralentit encore et cette fois-ci c’est nous qui devons suivre la direction prise par les mammifères. C’est également une autre règle du sanctuaire : adapter sa navigation à la direction des cétacés et se placer toujours parallèlement à eux, et non devant ou derrière. Nous sommes chez eux, ne l’oublions pas.

Les dauphins bleu et blanc sont les plus observés sur les côtes méditerranéennes. Selon l’association, leur population s’élèverait à 40 000 individus dans le sanctuaire. Ces chiffres sont excellents et montrent que le travail de protection entrepris il y a plus de vingt ans porte ses fruits.

Mais il y a encore beaucoup à faire, notamment sur la sensibilisation du public et en particulier des plaisanciers qui affluent chaque été. La Méditerranée est l’une des mers les plus bruyantes au monde, et pour cause : 20 % du trafic maritime mondial transite par cette mer ! Pelagos n’a toutefois pas vocation à empêcher le passage des bateaux marchands ou de plaisance. C’est à l’homme de prendre conscience de son impact négatif sur ce biotope exceptionnel. Je ne suis malheureusement pas certain que cela soit si facile.

Les associations comme SOS Grand Bleu sont justement là pour faire passer ces messages. Murielle propose ainsi au grand public des sorties à l’occasion de “journées cétacés” ou de classes de mer pour les enfants.

Murielle est passionnante et je pourrais passer des heures à l’écouter. Alors que le Santo Sospir fait route pour rentrer vers Saint-Jean-Cap-Ferrat, je ne peux m’empêcher de regarder le large en imaginant le nombre de mammifères marins qui évoluent dans ces eaux au bleu azur. Combien de temps faudra-t-il encore à l’homme pour comprendre que pour se sauver lui-même il doit forcément respecter la mer et les océans ?

 

 

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Par Gérald Ariano

Dans chaque épisode d’“Une vie de bêtes” sur Ushuaïa TV, Gérald Ariano part à la rencontre des professionnels du monde animal. Chacune de ces rencontres est l’occasion pour lui de travailler à leurs côtés et de découvrir les particularités de ces métiers passionnants.

 

Photos © SOS Grand Bleu